Comme tout bon candidat qui se prépare à l'échéance présidentielle, j'étudie avec précision les propositions et inflexions idéologiques de mes concurrents.
En revanche, je m'interroge beaucoup sur les axes historico-mémoriels de la campagne de la nouvelle candidate Marine Le Pen. Voulant briser (ou du moins le faire croire) son complexe
oedipien, cette dernière n'a cessé ces derniers mois de rappeler son indépendance face aux lourds héritages paternels. Il faut en effet lui reconnaître que cela ne doit pas être facile de
justifier sans cesse les excès passés de son père.
Soit. Reconnaissons lui donc la blancheur immaculée d'une Jeanne d'Arc qui n'aurait pas encore été brunie par la fumée pestilentielle d'un feu "détail de l'histoire".
1. "le banquet des mille"
La manifestation organisée ce week-end a été baptisée
"Le banquet
des Mille" par l'organisation frontiste. La salle ne pouvait-elle contenir que mille personnes ? Marine est-elle une inconditionnelle lectrice du
Banquet de
Platon ?
Pas du tout. Il s'agit en fait d'une référence érudite à
une manifestation du 14 mars 1948 visant à rassembler en association les droites françaises contre la IVème république, contre l'inéligibilité des anciens collaborateurs avec
l'occupant nazi et pour la réhabilitation de la mémoire du Maréchal Pétain.
En termes de symbole, on peut difficilement faire plus clair... même si cela jette du coup une ombre sur la blancheur immaculée précedemment supposée.
2. L'économiste modèle : François Perroux
Reprenant les thématiques portées par le candidat à la primaire socialiste Arnaud Montebourg, Marine Le Pen semble vouloir surfer sur la vague de la "démondialisation". Pas
question pour autant de donner l'impression que le programme du Front National est un mélange des idées du PS et de l'UMP. Du coup, Marine et ses conseillers tentent de justifier cet emprunt en
mobilisant les idéologues du parti.
Parmi les économistes, peu sont directement liés à l'extrême droite.
François Perroux n'est donc pas un représentant de cette tendance politique. Ces travaux sont aujourd'hui
encore reconnus et salués par ses successeurs. Néanmoins, son parcours durant la Seconde Guerre mondiale est un peu particulier : professeur à la faculté de droit de Paris entre 1939 et 1945, il
codirige la revue maréchaliste
La Communauté
française, collabore à
Idées,
revue de la Révolution nationale, puis crée en 1942 un groupe de réflexion,
Renaître, avec Yves Urvoy.
Bref, il semble encore difficile au Front National de renouveler suffisament les idées pour qu'elles ne trouvent pas systématiquement leurs racines au temps du Maréchal.
Sur ce point précis, je trouve d'ailleurs que les journalistes politiques n'approfondissent pas assez leurs interviews de la candidate du Front Nationale.
Quelles sont ses idées sur l'enseignement de l'histoire en France ? Souhaite-t-elle le réformer ? Contrôler les programmes ? A-t-elle une opinion sur les lois mémorielles ? Assistera-t-elle aux
cérémonies commémoratives de la Journée nationale de la déportation en avril 2012 ?
Ces sujets peuvent sembler très pointus et ne pas intéresser les citoyens au premier abord. Et pourtant, je pense que c'est en éclairant la vision de l'histoire d'un candidat qu'on peut (entre
autres sujets, il ne s'agit pas d'être exclusif) mieux comprendre sa vision de la France et ses projets pour l'avenir.
Pour écrire l'histoire, sans perdre la mémoire
Mémorice de France
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